Ici tout ou presque se fait dans la rue...

Tout d'abord... on mange dans la rue.
Certaines échoppes ont pignon sur rue et installent des terrasses sur le trottoir ; terrasses faites de petites tables et de petites chaises qui rappellent la dinette de l'école maternelle. D'autres restaurant s'installent pour la soirée ou la journée sur un coin de trottoir, tirent leur électricité d'un bâtiment attenant ou d'un générateur. Les denrées sont, dans le meilleur des cas, conservées dans une petite vitrine sur roulettes.

Tout est mobile ici et il n'est pas rare de voir des restaurants sur roulettes traverser la rue. Des barbiers et coiffeurs de rue, des réparateurs de vélos assis de cette manière si particulière, sur les talons, installés sur le bord du trottoir, des pompes à essence mobiles qui contiennent 5 litres et auprès desquelles les nombreuses motos viennent se ravitailler.

Dans la rue on se fait maquiller, manucurer, épouiller, on dort sur une table, sur sa moto, sur les produits d'un étal, on vend des billets de loterie, des souvenirs, des livres photocopiés, de la seiche séchée, des fruits, des dollars, des...

Dans la rue, des petites dames d'un certain âge baladent des bennes et ramassent les ordures que chacun regroupe tous les mètre et demi dans le caniveau.

Dans la rue des gens brûlent des faux billets - que l'on peut acheter n'importe où - dans des récipients en métal sur le bord du trottoir ou à l'entrée des magasins, en l'honneur d'un ancêtre peut-être.

Dans la rue les électriciens tirent des câbles pour remplacer ceux qui ne fonctionnent plus et qu'on ne retrouve pas dans le tricot qui vient du transformateur, lui-même accroché à la terrasse d'un restaurant en hauteur...

Dans la rue les motos roulent à toute allure et il n'est pas rare que deux se frôlent de très près pour doubler une voiture ou éviter un piéton. Une loi est passée pour rendre le port du casque obligatoire. Tout le monde ou presque en porte un maintenant, mais c'est plus symbolique qu'autre chose.

Je parle beaucoup des motos ici mais il y a peu de moments où l'on ne se trouve pas confronté à la circulation, qu'elle que soit la ville dans laquelle on se trouve (pour ce que j'en ai vu jusque là). Les klaxons résonnent au milieu de la petite musique des vendeurs de glace à vélo, des signaux de recul qui chantent la Lambada, de la sirène des quelques policiers qui déboulent en Toyota aux allures de voiture américaine, gyrophare compris...

Dans la rue, par contre, les amoureux n'ont pas le droit de se tenir de trop près et il faut attendre le soir à Ha Noi, près du lac Hoan Kiem, pour voir des ombres se serrer l'une contre l'autre.

Dans la rue on joue aux dames chinoises, on attend aussi, on attend, on attend...

Dans la rue le parti donne les dernières nouvelles, comme je l'ai déjà dit, les dernières lois, à heures fixes et si personne ne semble écouter les enceintes qui gueulent, tout porte à croire que le message passe tout de même.

Dans la rue les gens te sourient, françillon, pour te vendre quelque chose ou pour plaisanter ; les gens râlent, parce qu'ils en ont assez qu'on les prenne en photo.

Dans la rue, un mec qui veut te vendre des livres finit par s'asseoir avec toi et tu lui offres une bière et un peu de seiche, en plus d'une sèche. Tu cause quelques minutes. Il est loin, il est à côté. Comme on dit ici : "Same-same... but different" !

La rue

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